Nicolas : Avec cette tournée, Amaranthe est en tête d'affiche pour la première fois. Qu'est-ce que ça fait ? Est-ce que tu ressens plus de pression ?
Elize : En fait, j'ai commencé cette tournée comme d'habitude. Après quelques soirs, j'ai finalement pris conscience que nous étions en tête d'affiche ! Ça m'a pris quelques jours car ce n'était pas naturel pour nous. Et j'ai réalisé que nous avions un public plus important, maintenant que nous sommes en tête d'affiche, qu'à l'époque où nous n'étions que des premières parties. Cela prouve que quelque chose s'est vraiment passé et que travailler dur a fini par payer. C'est donc incroyable !
Guillaume : Comment occupes-tu ton temps en tournée lorsque tu n'es pas sur scène ? Est-ce que tu lis un peu ? Tu écoutes de la musique ? Ou bien tu en profites pour visiter un peu les villes que vous traversez ?
Le truc c'est que je dors généralement jusqu'à 4 heures de l'après-midi. C'est d'ailleurs pour ça que je parais fatiguée en ce moment, j'ai du me réveiller à 9 heures ce matin. Il y a une raison à cela : la première, c'est qu'on joue assez tard ce soir. Après un concert, tu as accumulé tellement de bonnes ondes que tu débordes d'énergie. C'est un peu comme les sportifs après une compétition, avec l'adrénaline, il est difficile de se calmer immédiatement après. Donc je reste éveillée jusqu'à tard dans la nuit, et je ne me couche pas avant 3 ou 4 heures du matin. Certaines nuits, je reste même debout jusqu'à 8 heures du matin. Je profite de la nuit pour écouter de la musique, j'adore ça, je peux en écouter toute la nuit. Mais mes oreilles ne se reposent jamais, et c'est pour ça que je commence déjà à devenir sourde ! (rires) Si ça continue, je ne parviendrai pas à entendre les voix de mes petits-enfants, mais ça vaut le coup car j'aime vraiment écouter de la musique ! (rires) En ce moment, je suis particulièrement fan de la B.O. de « 50 Nuances De Grey ».
Guillaume : Avez-vous pu visiter un peu Paris ?
Oui ! On a pu s'arrêter prendre un thé et on a eu du temps libre à midi. On en a donc profité pour venir ici et prendre quelques photos, puis on est allé dans un bar. On a un peu visité le quartier. Et on a aussi bu du Bordeaux ! Bref, on a vécu à la française, et j'ai adoré ! Je pourrais me voir vivre ici et aller au café tous les jours ! (rires)
Guillaume : Tu as dis dans une interview pour un webzine américain que tu aimais beaucoup les Etats-Unis parce que les boutiques étaient ouvertes toute la nuit contrairement à en Europe.
Oui, c'est tout à fait ça, c'est un des avantages des Etats-Unis. Dernièrement, nous étions en Angleterre et là-bas tous les magasins ferment à 16h30, ce qui est extrêmement tôt ! (rires) Et après cette heure, il n'y a plus grand chose à faire. Mais ici en France, je suis contente de voir qu'il y a encore des endroits ouverts après 23h ou plus ! Donc ici aussi, il est donc possible de vivre la nuit !
Guillaume : Surtout dans ce quartier, c'est le coin parfait !
Oui, il y a comme quelque chose de magique ici. Bien sûr, s'il ne fait pas trop froid dehors ou que c'est l'été, j'aime également sortir la journée. Mais en hiver, j'apprécie de rester dans ma grotte comme une ourse la journée, pour ne sortir que le soir. Je ne suis pas encore allé voir le spectacle « Féerie » du Moulin Rouge, mais j'irai peut être ce soir, si j'ai le temps.
Nicolas : Beaucoup de groupes profitent d'avoir le temps de jouer une setlist complète pour faire une reprise d'un de leurs groupes préférés. Est-ce prévu ? Peut-être sur le prochain album ?
On en parle à chaque album, mais nous n'avons toujours pas trouvé le morceau idéal. Quand je pense avoir trouvé la chanson qui irait, on découvre qu'un groupe en a déjà fait une reprise avant nous. Et faire une reprise d'un morceau qui a déjà été repris récemment, on ne trouve pas ça très intéressant. On aimerait trouver une chanson unique. Ça pourrait être un vieux morceau de Franck Sinatra par exemple, ou un morceau connu de pop, comme une chanson de Lady Gaga par exemple.
Guillaume : N'avez-vous jamais envisagé de reprendre le morceau « Amaranth » de Nightwish ? (rires)
Oh non, même si j'adore ce morceau ! C'est marrant d'ailleurs car je ne connaissais pas encore cette chanson quand on a créé le groupe. Et c'est lorsque j'ai cherché sur Google les différentes façons d'écrire ce mot que je suis tombée sur cette chanson de Nightwish. Mais j'avoue que ce serait marrant qu'on la joue sur scène un jour. (Elize commence à chanter le refrain)
Guillaume : Et d'ailleurs, pardon si cette question t'a souvent été posée, mais pourquoi avoir choisi « Amaranthe » comme nom de groupe ?
Nous avions en tête le mot « Avalanche » en premier, mais ce n'était pas un mot très positif. Le problème était que nous avions déjà travaillé l'artwork, puis en plus, nous avons appris ensuite qu'un groupe avait déjà pris ce nom là. Ils étaient prêts à nous le vendre, mais à un prix exorbitant et alors qu'on était un petit groupe sans argent ! On a donc choisi de prendre un autre nom. On a alors cherché un nom qui ressemblait et qui avait ces trois « A », comme dans notre artwork. On a finalement trouvé « Amaranthe » et on a tous adoré ce nom. En grec ancien, ce mot signifie « quelque chose qui ne disparaît jamais ».
Guillaume : « une fleur qui ne meurt jamais ».
Tout à fait, c'est une très belle façon de le dire !
Nicolas : Guillaume est un vrai poète.
Ah oui ? (rires) Dans tous les cas on est très content de ce nom, qui est bien plus intéressant et positif que « Avalanche ».
Guillaume : Le bassiste d'Amaranthe est aussi l'un des anciens membres du groupe Engel, qui assure votre première partie avec Santa Cruz. Est-ce que tu peux nous parler un peu de ces deux groupes ?
Je peux déjà vous dire que sur le plan personnel, j'adore leur musique. Je suis une chanteuse, donc j'aime bien regarder leur set-list pour chanter les morceaux, et la set-list d'Engel est vraiment bonne ! Santa Cruz est une grande source d'inspiration pour moi : ils sont jeunes, puisqu'ils ont tous entre 22 et 23 ans, et ils ont un look tout droit sorti des années 80. Je trouve ça courageux de leur part, d'assumer ce look et de le vivre à fond. Leur musique est vraiment bonne. On l'écoute souvent dans le bus, parce que pendant qu'ils jouent le soir, nous sommes en train de nous préparer et nous n'avons donc pas encore eu l'occasion de les voir jouer. Mais peut-être ce soir. En tout cas, c'est un groupe que je recommande, ils sont vraiment bons, et on passe beaucoup de bons moments ensemble sur cette tournée !
Nicolas : Est-ce que vous pensez déjà au prochain album ?
Ah ! Et bien justement je vais revenir sur une de vos questions sur ce qu'on fait de notre temps libre en tournée : car en plus d'écouter de la musique, j'en écris ! C'est vraiment un besoin que j'ai. Je pense à quelque chose, mais je n'ai personne avec qui en parler, alors j'écris une chanson dessus. Et c'est de cette manière que je parviens à ne plus y penser. Mon cerveau est toujours en activité : je n'ai pas de bouton on/off parce que je suis une artiste 24 heures sur 24. Je suis donc toujours à la recherche de nouvelles idées pour le prochain album. Actuellement, j'ai déjà 5 ou 6 idées en tête. Ainsi, quand nous déciderons de nous retrouver pour commencer à travailler sur le prochain album, je viendrai avec mes idées et les gars du groupe y ajouteront les riffs de guitares et de clavier. Puis il restera à ajouter les lignes de chant, et ce sera bon ! Ce n'est pas plus difficile que ça, c'est généralement comme ça que ça marche ! (rires)
Nicolas : Tu as fait des apparitions dans plusieurs autres albums, par exemple avec Kamelot ou Timo Tolkki. Est-ce que tu aimerais avoir un invité à ton tour sur le prochain album d'Amaranthe ?
Je crois que nous n'aurons jamais d'invité sur un album d'Amaranthe. La raison est simple : nous sommes déjà beaucoup trop ! (rires) Il n'y a plus de place ! Mais si un jour je faisais quelque chose en solo, alors j'essaierais sûrement d'avoir un invité sur mon album. Mais pas avec Amaranthe.
Guillaume : Amaranthe est un groupe très productif : depuis 2011, vous avez déjà sorti 3 albums, 9 singles, 8 clips et vous avez fait 265 concerts !
Wahou, je ne le savais même pas, merci ! (rires)
Guillaume : Oui, ce soir à Paris, ce sera votre 266ème concert !
266 ? Mon dieu, c'est trop cool !
Guillaume : Comment arrivez-vous à faire tout ça, sans oublier les projets parallèles ?
Je dirais qu'on y arrive car sinon, on s'ennuierait très vite. Nous n'avons pas créé ce groupe pour avoir du succès mais parce qu'on trouvait cela fun et qu'on avait énormément d'inspiration. Quand on a commencé les premiers concerts, on s'est vite ennuyé car nous n'avions pas assez de chansons. Et on s'est dit que si un jour on nous demandait de jouer 90 minutes, on n'aurait tout simplement pas assez de morceaux. Donc on devait composer davantage. Comme le public était vraiment derrière nous dès le départ, ça nous a beaucoup porté et on s'est dit : « OK, les gens aiment ce que nous faisons, alors continuons d'écrire des morceaux ». Ça tombait bien, puisqu'on avait encore plein d'idées en tête : après le premier album, on avait déjà assez de chansons pour composer deux autres albums.
Guillaume : Penses-tu que vous n'auriez été capable d'être en tête d'affiche qu'après trois albums ?
En fait, on a déjà été en tête d'affiche sur quelques festivals à l'époque de notre premier album. Mais en réalité, je ne sais pas... J'imagine que les autres groupes ne se posent pas vraiment cette question.
Guillaume : En tout cas, votre rythme de composition est soutenu ce qui est assez rare pour être souligné !
C'est vrai... On compose ensemble. Par exemple, j'ai des idées de lignes vocales : je les enregistre sur mon téléphone, comme ça je les ai toujours avec moi. Puis je les amène pour nos séances de composition, je les chante et on compose la musique. On fait ça entre les tournées. Pour le prochain album, je pense qu'on aura du temps en début d'année prochaine pour écrire les nouveaux morceaux. On a été très vite pour le troisième album : on s'est retrouvé chez Olof et en cinq jours on avait écrit 7 ou 8 morceaux. Le fait de savoir que ce qu'on faisait alors sortirait dans quelques mois nous a donné un maximum d'inspiration. Et les tournées nous inspirent également pour la composition. Mais oui, on va assez vite !
Nicolas : Comme tu le sais, nous nous occupons aussi du fan club français de Nightwish. Peux-tu nous raconter un peu le soir à Denver où tu as remplacé Anette sur scène ?
Oh c'était le bazar ! Vous savez, Nightwish est la raison pour laquelle je suis aujourd'hui dans un groupe de metal. J'avais tenté leur audition en 2005, lorsqu'ils cherchaient une nouvelle chanteuse. J'avais enregistré des morceaux, Olof m'avait aidé et au lieu de le rémunérer, je lui ai donné ma voix sur son album. Puis ensuite, j'ai eu mes propres compositions que je souhaitais sortir sur album. Alors j'en ai parlé à Olof qui m'a proposé de faire un groupe comme Nightwish, mais avec nos propres compositions et envies. Je suis heureuse aujourd'hui car si j'avais été dans Nightwish, je n'aurai pas pu chanter mes propres chansons. Mais puisque je n'ai pas été retenue, ça m'a fichu un coup et ça m'a motivé pour créer un groupe. Je me suis dis « je vais devenir encore plus grand que Nightwish ! » (rires). C'est pour cette raison que, sur scène, je me suis senti capable de chanter les morceaux. Pour beaucoup, c'était ceux que j'avais enregistrés pour l'audition. Mais il y avait aussi les nouveaux morceaux que je connaissais moins et qu'il a fallu chanter. C'était surréaliste. En résumé : j'ai passé l'audition, je n'ai pas eu le job, et j'ai créé mon propre groupe. Je me retrouve en tournée avec Kamelot pour chanter les chœurs, et j'ai cette opportunité unique de monter sur scène avec le groupe qui était la raison même de ma présence sur cette tournée !
Guillaume : As-tu appris que tu allais monter sur scène avec Nightwish seulement quelques minutes avant le concert ?
Oui, un quart d'heure avant. Au début, j'ai paniqué. Car lorsque tu es une professionnelle, tu ne montes pas sur scène avec une feuille contenant les paroles, c'est la règle numéro 1 ! Mais le public était super et ce fut un moment très spécial, une belle histoire que je pourrai raconter à mes petits-enfants ! (rires) Par contre, tout ce qui a suivi cette soirée était triste. Mais c'est une autre histoire. Je n'étais d'ailleurs pas du tout au courant de ce qui se tramait alors que j'étais sur scène.
Guillaume : Quelques jours avant Noël dernier, tu as chanté sur scène pour le Raskasta Joulua Tour au Icehall d'Helsinki. Peux-tu nous en dire plus sur le concept de ce show et plus spécialement sur ton duo en suédois avec Tony Kakko ?
C'était sur un morceau suédois, et quand nous l'avons enregistré en anglais, c'était la première fois qu'il était enregistré dans cette langue. Nous avons contacté l'auteur du morceau pour lui demander une traduction et pour qu'il puisse être payé. J'aime beaucoup le concept de ce concert, qui existe depuis dix ans. Au début, ils ont commencé avec une toute petite équipe et ils trouvaient sympa l'idée de reprendre des morceaux de Noël dans un style plus rock. Quand je les ai rejoins, c'était la première fois qu'une femme se joignait au groupe. C'est devenu aujourd'hui un concert événement en Finlande. Mais c'est parce que, là-bas, le metal est la musique principale. Ce n'est donc pas surprenant que les gens soient enclins à écouter des chansons de Noël revisitées dans des versions rock. Et c'était un bon moment de chanter avec Tony, c'est un super chanteur, et il a beaucoup d'humour !
Guillaume : Si je ne dis pas de bêtise, il chantait en suédois.
Oui, exactement, et d'ailleurs, il n'était pas très bon dans cette langue ! (rires) Désolée, Tony ! Je pense qu'en Finlande, c'est du 50/50, certains parlent suédois et d'autres non. Certains l'apprennent à l'école, mais pour Tony, je ne sais pas. En tout cas, il était accompagné d'une personne qui l'aidait durant l'enregistrement, notamment pour la prononciation, et au final ce n'était pas si mal ! Tu peux le voir sur le DVD. Le concert a été filmé l'année dernière à Helsinki. C'est en fait un DVD bonus du CD du concert. Je pense qu'ils referont la même chose pour Noël prochain. C'est une équipe vraiment sympa !
Guillaume : Récemment, tu as chanté au Melodifestivalen 2015 en duo avec Rickard Söderberg, et en tant que demi-finaliste du concours de l'Eurovision. J'ai été surpris de voir Daniel Gildenlöw parmi les candidats, comme il avait déjà participé au concours en 2010 avec Pain Of Salvation. Est-ce qu'il te paraît juste de dire que le metal est aussi populaire en Suède qu'il l'est en Finlande ?
Non, je ne pense pas. Les principales radios ne diffusent pas de metal. Ils aiment jouer des morceaux de rock, et il y a bien une station plus spécifique pour écouter des vieux morceaux de rock. Mais ce n'est pas du tout comme en Finlande. On est loin du « Hard Rock Halleluja » de Lordi (Elize commence à chanter le morceau). Je pense que si Lordi avait été candidat en Suède, ils n'auraient jamais eu le soutien qu'ils ont eu en Finlande. De mon côté, puisque j'étais candidate, j'avais écrit le morceau. C'était vraiment un rêve qui devenait réalité : je pouvais enfin présenter cette partie de moi-même. Tu sais, je ne veux pas me restreindre à n'être qu'une chanteuse de metal parce que ce n'est vraiment pas le cas du tout. Je suis une artiste de musique sans étiquette, et s'il fallait m'en mettre une, je dirais que je suis plutôt une chanteuse de pop ! (rires)
Guillaume : En fait, je t'imaginais comme une chanteuse de metal qui fait parfois de la pop. Mais donc, pour toi, ce serait plutôt l'inverse.
Oui, c'est le contraire ! J'ai eu des cours de musique pendant six ans. Et je pense que ma voix est davantage une voix pour la pop, si tu vois ce que je veux dire. Tu sais, j'adorerais pouvoir être candidate avec Amaranthe, mais les autres membres du groupe ne sont pas du tout fans de l'Eurovision. Ce n'est pas assez « metal » pour eux ! Mais j'espère les convaincre un jour ! (rires) Je ne vois pas de problème à faire cela. Mais ce n'est pas grave. J'ai la chance de pouvoir le faire de mon côté, et tant mieux, car il y a encore tellement de choses que j'aimerais faire !
Nicolas : Pour terminer, voudrais-tu rajouter quelque chose ?
J'aime beaucoup nos fans français. Et je sais que cette interview sera publiée après le concert, mais j'espère que le concert de ce soir, au « The Moulin Rouge La Machine in Paris » (à dire avec un petit accent mi-suédois, mi-français) sera bon ! J'espère revenir bientôt. Merci d'avoir pris le temps de m'interviewer !
Nicolas : Et merci à toi ! (en français dans le texte)
Oh oui, « merci ! ». Ma sœur parle parfaitement le français, mais à l'école, j'ai choisi l'espagnol ! (rires) Je regrette aujourd'hui, j'aurai préféré choisir le français car c'est une très belle langue !
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