Sabrina : Depuis le début de cette tournée, vous jouez cinq morceaux choisis par les fans à chaque concert et vous partagez, de manière générale, beaucoup de choses sur les réseaux sociaux. Est-ce quelque chose qui vous tient très à cœur ?
Charlotte : Je pense que c'est très important oui, et les réseaux sociaux offrent clairement une super plateforme pour avoir ce contact. C'est marrant que tu mentionnes les cinq chansons choisies par les fans parce que notre expérience avec ça a vraiment été bizarre ! Les gens ont choisi certaines chansons mais quand on les a jouées en live, les gens nous ont regardés avec de grands yeux ! (rires) Du coup, maintenant, on ne joue plus systématiquement toutes les chansons choisies et ça n'a l'air de gêner personne. Mais c'est un bon moyen d'avoir des retours, ce qui est clairement une bonne chose.
Guillaume : Est-ce que vous avez été surpris par certaines des chansons choisies par les fans ?
Je pense que « Silhouette Of A Dancer » a été une surprise parce qu'on ne l'avait pas jouée depuis longtemps et je ne pensais pas que c'était aussi populaire auprès des fans. Un autre choix qui est à la fois surprenant et pas surprenant, c'est « We Are The Others ». Nous jouons bien sûr cette chanson à tous les concerts donc cela veut dire que beaucoup de gens qui n'ont pas encore eu l'occasion d'aller à nos concerts sont impliqués sur les réseaux sociaux. Et je pense que c'est une bonne chose parce que s'ils aiment ce qu'ils y voient, cela veut peut-être dire que la prochaine fois, ils achèteront un ticket pour venir faire la fête avec nous !
Guillaume : Depuis le début de cette tournée, vous proposez aux fans des meet & greet avant les concerts. Est-ce que c'est quelque chose que les fans réclamaient ou est-ce votre idée ?
C'est une chose à laquelle nous pensions depuis très longtemps. En tant que groupe, nous avons toujours mis un point d'honneur à sortir et rencontrer les fans après les concerts. Et ce n'est pas quelque chose que nous allons arrêter de faire parce que nous faisons maintenant des sessions VIP. Et d'ailleurs, ces sessions ne sont pas que des meet & greet, parce qu'en fait, je trouve que c'est assez nul de faire payer les gens pour nous rencontrer. Nous mettons un point d'honneur à faire ça bien. Donc nous leur donnons un joli pass VIP et une carte postale spéciale avec la date du concert. Ensuite, ils ont la possibilité de faire des photos et surtout de voir deux chansons en acoustique. Il y a aussi un mini-show. Puis enfin ils peuvent rester à l'intérieur de la salle pour garder leur place au premier rang. On essaie d'en faire quelque chose d'intéressant pour tout le monde. Et d'un autre côté, pour être honnête, tourner coûte très cher et c'est une autre façon pour un groupe de joindre les deux bouts. Et jusqu'ici tout le monde a été très content de ces sessions VIP, alors du coup, je suis très contente que ça marche parce que c'est la première fois que nous faisons ça.
Sabrina : Vous avez récemment joué dans de très grandes salles et des stades en première partie de Nightwish et beaucoup de vos concerts de cette tournée en tête d'affiche européenne sont sold out. Evidemment c'est une bonne nouvelle, mais est-ce que ça met une certaine pression sur vos épaules pour le prochain album de la part du management ou de la maison de disque ?
En fait, nous nous occupons en grande partie de notre management nous même, donc de toute façon, on ne reçoit aucune pression du management ! Beaucoup de personnes nous aident mais elles le font toujours à notre demande. Il n'y a aucune pression du label : seulement de l'aide, et je pense que c'est toujours comme ça que cela devrait se passer. Et à propos de la pression pour faire un meilleur album, ça ne devrait pas venir du nombre de personnes qui viennent à nos concerts mais, en tant que musicien, cela devrait venir de nous-même. Bien sûr, on a toujours envie de faire un bon album, mais pour moi ce n'est pas dépendant du nombre de personnes qui viennent aux concerts. Si demain, il n'y avait que deux personnes dans la salle, j'aurais toujours envie de faire un bon album. Mais heureusement, jusque là, les gens continuent de venir aux concerts !
Guillaume : Après avoir tourné depuis un moment avec Merel Bechtold, vous avez récemment annoncé qu'elle deviendrait un membre à part entière du groupe. Si on peut dire qu'elle a déjà fait ses preuves sur scène, que penses-tu qu'elle pourra apporter au groupe et aux futurs albums ?
Premièrement, comme tu l'as dit, on a déjà remarqué la différence sur scène. Il y a quelques chansons sur nos albums qui sonnent bien mieux avec deux guitaristes sur scène. Nous n'avions jamais joué certains morceaux en live parce que ça ne marchait pas vraiment avec un seul guitariste. Par exemple, on a commencé à jouer « Goodbye My Lullaby » sur cette tournée et je pense que la transition entre le studio et la scène marche très bien quand on a deux guitaristes. Quand on écrit les chansons, on ne pense pas vraiment à comment on devra faire pour les jouer sur scène. Si une chanson a besoin de deux guitares, ou six ou 200, c'est ce qu'on fera. Et c'est seulement après qu'on réfléchit à la façon de la jouer en live ! Avoir deux guitaristes rendra la transition nettement plus facile. Et bien sûr cela marche autant sur le plan musical que personnel donc nous sommes très contents de cette décision !
Sabrina : Lors de notre dernière interview, tu nous avais dit qu'en novembre 2015, vous seriez en plein travail sur le nouvel album. On sait que vous jouez déjà un nouveau morceau depuis le début de cette tournée. Peux-tu nous dire où vous en êtes à ce sujet ?
On a déjà pas mal avancé parce qu'on avait anticipé le fait qu'on ferait beaucoup de concerts cette année. Nous avons déjà commencé à écrire l'année dernière et à chaque fois que nous avions du temps libre. Nous avons prévu des sessions d'écriture et avons composé de nouveaux morceaux pour que nous ne soyons pas trop pressés au moment d'enregistrer et de produire l'album. Pour le moment, nous avons déjà cinq ou six morceaux de prêts.
Sabrina : D'un point de vue thématique, chaque album a été plus intéressant que le précédent. Peux-tu déjà nous parler de certains thèmes qui seront abordés dans le prochain album ?
Non ! (rires) Je suis désolée, c'est trop tôt pour le moment !
Guillaume : On a pu voir que tu t'es essayé aux grunts sur scène pour remplacer Alissa White Gluz sur « Tragedy Of The Commons », et tu étais plutôt convaincante. Est-ce que c'est quelque chose que tu pourrais envisager de faire sur album ?
Oh merci ! Et oui, ça se pourrait parce que j'ai vraiment aimé faire ça. Mais par exemple, sur cette tournée, je ne le fais pas parce que je ne suis pas assez entraînée. Les grunts c'est cool si tu fais ça bien mais si tu le fais mal, tu peux facilement t’abîmer la voix. Pour les semaines à venir, nous avons seize concerts de prévus sur 18 jours, alors j'essaye d'y aller doucement. Mais j'essaie de m’entraîner et si c'est quelque chose qui devient vraiment confortable pour moi, alors pourquoi pas. Mais sur nos albums, nous essayons aussi de mettre les gens là où ils sont les meilleurs. Et je connais aussi de nombreuses personnes qui sont bien meilleures que moi sur les grunts. (rires) Donc je peux aussi imaginer demander ça à quelqu'un qui est spécialiste.
Sabrina : Tu as aussi récemment travaillé sur Phantasma, un projet en collaboration avec Georg Neuhauser de Serenity et Oliver Phillips. Sur ce projet, on a entendu certaines facettes de ta voix que nous n'avions pas l'habitude d'entendre. Quelque chose de plus lyrique sur « Enter Dreamscape » ou de plus folk, qu'on avait déjà entendu brièvement sur « Start Swimming ». Est-ce quelque chose que l'on pourrait retrouver à l'avenir avec Delain ?
En fait, il n'était pas prévu que je chante sur « Enter Dreamscape ». Mais finalement, ça s'est fait comme ça. Et tu as raison, ce n'est pas mon style de chant habituel. Mais en général, je n'aime pas spécialement un style de chant plus qu'un autre. C'est juste que je vais travailler de la façon qui convient le mieux à chaque chanson. Dans un cas, c'est un style, et dans un autre, c'est un autre style. Bien sûr, le style des chansons sur cet album est assez différent, mais j'essaie juste de voir quel style convient le mieux avec l'histoire que nous racontons.
Sabrina : L'album Deviant Hearts est basé sur un petit roman que tu as écrit. On sait que tu es habituée à écrire puisque tu écris la plupart des chansons de Delain, mais est-ce la première fois que tu écris une histoire plus longue ?
Oui, c'est le cas et c'est d'ailleurs un peu fou. Parce que lorsqu'on commence à écrire de la fiction, on aurait plutôt tendance à partir sur une histoire très courte. Ou au moins avec des choses que l'on garde pour soi ou sur lesquelles on passe beaucoup de temps à faire des corrections. Mais on a brisé les règles dès le début, puisqu'on avait la garantie que ce serait publié... et ça faisait très peur. Et maintenant, c'est même terrifiant de se dire que ça va sortir très bientôt ! Mais j'ai vraiment adoré faire cela. Alors, qui sait ? Peut-être que je le referai !
Sabrina : On a déjà une première idée de l'histoire grâce aux teasers postés sur Facebook, mais peux-tu nous faire un petit résumé de l'histoire ?
Et bien en gros, cela raconte l'histoire de deux enfants ayant une maladie cardiaque très rare et imaginaire qui les force à rester enfermés chez eux, ce qui est très frustrant pour eux. Et puis un jour, l'un deux plie une centaine de grues en papier et un tas de trucs très bizarres commence à leur arriver ! (rires) Voilà en gros le résumé de l'histoire.
Sabrina : On a eu la chance de découvrir l'album depuis quelques semaines. Si les fans de Delain ont déjà pu en avoir un aperçu avec les deux premiers clips, l'ensemble de l'album a des influences assez différentes de Delain. Notamment des influences rock comme Meat Loaf et ce qu'on pense être une référence à Nick Cave. Peux-tu nous en dire un peu plus pour donner un aperçu de cet album aux fans ?
Tu dois savoir que nous étions trois à travailler sur cet album et nous venons tous les trois de directions assez différentes. L'un vient plutôt du prog, l'autre du symphonique classique et moi d'un style plus alternatif. Et au fait, merci pour la référence à Nick Cave, je prends ça comme un compliment. (rires) Les styles différents peuvent vraiment être attribués aux différents compositeurs mais je suis aussi contente que l'ensemble soit cohérent.
Guillaume : En mai, nous avons aussi découvert ta collaboration sur la très jolie ballade de Kamelot « Under Grey Skies ». Thomas Youngblood nous a dit que cela avait été enregistré assez rapidement. Peux-tu nous en dire un peu plus sur cette collaboration ?
Oui, c'est vrai ! En gros, j'ai reçu un email de Thomas pendant que nous étions en tournée avec Sabaton, pour me demander si j'avais envie de chanter sur ce morceau. Je lui ai dit : « bien sûr, j'enregistrerai ça dès mon retour à la maison ». Mais il m'a dit qu'en fait ils en avaient besoin assez vite. Nous jouions à Athènes à ce moment là et Merel s'est arrangée pour que nous puissions enregistrer le morceau avec un ami à elle un peu avant notre concert ce soir là. Donc ça a vraiment été enregistré entre deux concerts. Mais j'aime vraiment beaucoup cette chanson, j'adore aussi le travail de Troy. Je trouve que les paroles me correspondent bien dans un certain sens et du coup, je suis vraiment très contente de cette collaboration.
Sabrina : Ça nous a rappelé que ta voix était aussi très jolie sur des ballades. Il n'y en avait pas sur le précédent album (sauf en bonus). Est-ce qu'on en retrouvera sur le prochain ou est-ce que vous allez continuer sur la lancée du dernier qui était résolument plus heavy que les précédents ?
Pour être honnête, à chaque nouvel album, nous essayons de faire quelque chose de plus heavy et riche que le précédent. Ce n'est à priori pas au programme mais même quand ce n'est pas prévu, une ballade arrive parfois à se glisser. Nous en avons déjà une dont nous sommes très fans. Donc il se peut qu'il y ait quand même une ballade sur le prochain album. Oui, je pense en fait que celle-là restera sur l'album !
Guillaume : Quel est le prochain gros projet que tu aurais envie de mettre en place avec Delain ?
Et bien il y a deux choses que j'attends avec impatience ! D'abord, il y a le concert en janvier qui s'appelle « Sucker Punch ». Les concerts les plus cools que nous ayons fait ces dernières années sont ces concerts spéciaux à la fin de chaque cycle d'album. C'est une soirée où nous célébrons les précédents albums et présentons certains des nouveaux morceaux. Voici donc le premier événement que j'attends avec impatience. Ça sera fin janvier au Patronaat en Hollande, comme le concert « My Masquerade » de l'année dernière. Et ensuite, on approche de l'anniversaire des dix ans du groupe, puisque Lucidity est sorti en septembre 2006, et nous prévoyons de célébrer ça comme il se doit ! Je ne peux pas trop en dire, mais je peux déjà dire que ce sera un événement que nous attendons avec impatience ! (rires) En plus de ça, notre ambition principale est de continuer à écrire des chansons qui nous plaisent, et de tourner dans de nouveaux pays, et de faire des tournées de plus en plus importantes, et de toucher plus de gens avec notre musique.
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